L’exposé développera les points suivants :
- Les mots en qu- interrogatifs (et exclamatifs) sont des indéfinis (variables x), formant un paradigme ontologiquement structuré (entités +Hum, entités –Hum, Lieu, Temps, Qualité – manière, Quantité). Le système français présente certaines particularités, reflets de l’évolution de la langue (notamment les blocages à l’emploi du pronom –Hum, l’homonymie que pronom / que adverbe de quantité, …).
- Une variable peut lier deux prédications (Ex. : Embrassez qui vous voudrez, Reste où tu es, Fais comme on t’a dit). Les interrogatifs – indéfinis forment donc une classe de subordonnants naturels (repérable dans une bonne partie des langues du monde). L’unité de cette classe, en partie occultée et amoindrie par les particularités du français, est méconnue par la tradition grammaticale, mais n’en est pas moins claire : – emplois nominaux (Embrassez qui vous voudrez, à ne pas prendre pour une relative !) / – emplois adverbiaux (‘circonstanciels’, en où, quand, comme, que). De plus les complétives (Je crois que P) constituent un emploi nominal particulier (dans lequel la variable porte sur ‘ce que P est’).
- Une variable peut être ‘captée’ par un N (antécédent) et devenir un ‘pronom relatif’. Cette évolution, par laquelle un indéfini devient une sorte d’anaphorique, est rare dans les langues du monde. Elle va de pair avec d’importantes restrictions et modifications du paradigme : le paradigme du relatif n’est pas celui de l’interrogatif-indéfini.
En conclusion, on relèvera que le système français de la subordination se caractérise, d’une part, par une organisation très structurée reposant sur l’utilisation des marqueurs de variable en qu-, et d’autre part, par l’extension d’emploi des relatives, qui viennent compléter ou concurrencer les autres types de subordination (un antécédent postiche permet de reconstituer une sorte de ‘variable de synthèse’, sans blocage à l’emploi : ce qu- ≡ quoi).
Source : Pierre Le Goffic, Grammaire de la Subordination, Ophrys (L’essentiel Français), 2019.